Tentative de coup d’État au Bénin : panique, échec et retour au calme

Dimanche 7 décembre 2025, le Bénin s’est réveillé sous le choc. À l’aube, des militaires annoncent à la télévision nationale la chute du pouvoir en place. En quelques minutes, la rumeur d’un coup d’État se répand dans tout le pays, semant la stupeur. Les rues se vident, les commerces ferment, les téléphones crépitent. Mais très vite, la riposte des forces loyalistes, appuyées par des partenaires régionaux et internationaux, inverse le rapport de force. En moins d’une journée, l’ordre est rétabli. Derrière ce retour au calme, une nation encore sonnée tente de comprendre ce qui s’est réellement joué.

Qui sont les mutins et quelles étaient leurs revendications ?

Les auteurs de la tentative de putsch se présentent sous la bannière du Comité militaire pour la refondation (CMR). Leur chef présumé, Pascal Tigri, lieutenant-colonel issu de la garde présidentielle, apparaît comme la figure centrale de cette entreprise hasardeuse. Entouré de quelques officiers et sous-officiers, il s’auto-proclame « président de la transition ».

Le discours des mutins se veut justificateur. Ils dénoncent une situation sécuritaire jugée catastrophique dans le nord du pays, l’insuffisance de moyens sur le terrain, mais surtout l’abandon des soldats blessés ou tués au combat. Ils accusent ouvertement les autorités de mauvaise gouvernance, de mépris envers l’institution militaire et d’indifférence face à la détresse des familles endeuillées. Derrière ces revendications se dessine un profond malaise interne, sur fond de frustrations accumulées.

Le déroulé de la mutinerie et l’intervention des forces loyalistes

Tout commence aux premières heures du dimanche. Les mutins neutralisent le signal de la radio et de la télévision publiques, puis prennent la parole en direct pour annoncer la dissolution du gouvernement. Pendant quelques instants, l’illusion d’un basculement s’installe.

Mais la réaction ne se fait pas attendre. Les forces loyales au président Patrice Talon lancent une contre-offensive ciblée. Les sites stratégiques sont repris un à un, notamment le siège de la télévision nationale. Des échanges de tirs éclatent dans plusieurs quartiers de Cotonou. L’atmosphère est électrique. Peu avant midi, le signal de la télévision est rétabli : le coup a échoué.

Dans l’urgence, Cotonou sollicite un appui extérieur. La CEDEAO active sa force de réserve. Des unités du Nigeria, de la Côte d’Ivoire, de la Sierra Leone et du Ghana sont mobilisées pour sécuriser les points sensibles et dissuader toute résurgence de la mutinerie. La France, de son côté, répond à la demande béninoise en apportant un soutien logistique, du renseignement ainsi que des capacités de surveillance et d’observation, sans engagement direct de troupes au sol.

Bilan humain, otages, arrestations et réactions officielles

Le bilan humain reste lourd de sens. Les autorités reconnaissent des pertes dans les deux camps, sans en préciser immédiatement le chiffre exact. Quatorze mutins sont arrêtés dans la foulée, parmi lesquels plusieurs officiers impliqués dans la planification. Le cerveau présumé de l’opération, Pascal Tigri, demeure cependant en fuite.

Durant la mutinerie, des otages ont été brièvement retenus, notamment dans des casernes et bâtiments administratifs. Ils seront tous libérés lors de la reprise du contrôle par les forces loyalistes.

Le ministre de l’Intérieur, Alassane Seidou, intervient en urgence à la télévision nationale pour annoncer que la tentative a été « totalement maîtrisée » et appeler la population au calme. Quelques heures plus tard, le président Patrice Talon prend la parole à son tour. Ton ferme, message rassurant : l’État tient debout, la République ne fléchira pas.

Le lendemain, lundi 8 décembre, un conseil extraordinaire des ministres se réunit. Parmi les décisions prises figurent le renforcement du dispositif sécuritaire sur l’ensemble du territoire, l’ouverture d’une enquête judiciaire approfondie, ainsi que des poursuites implacables contre tous les auteurs du complot.

Leçons, inquiétudes… et une présidentielle 2026 déjà en ligne de mire

Cette tentative de coup d’État agit comme un électrochoc national. Le Bénin, souvent cité comme un modèle de stabilité démocratique en Afrique de l’Ouest, a vacillé. Pendant plusieurs heures, la peur a gagné les foyers, les marchés, les administrations. La psychose s’est installée, révélant la fragilité d’un équilibre que l’on croyait acquis.

L’épisode met en lumière plusieurs failles : tensions internes à l’armée, déficit de dialogue, sentiment d’abandon des soldats engagés sur le front sécuritaire. Il rappelle aussi que la stabilité ne peut être tenue pour acquise, même dans les démocraties les plus expérimentées.

Dans ce climat troublé, une autre échéance plane : la présidentielle de 2026. Patrice Talon a confirmé qu’il ne sera pas candidat, conformément à la Constitution. Une page se tourne, dans un contexte désormais plus sensible que jamais.

Reste une interrogation lourde de sens : ce coup manqué n’a-t-il été qu’un accident de l’histoire ou le symptôme d’un malaise plus profond ? Une chose est sûre : la tentative du 7 décembre laissera une empreinte durable dans la mémoire collective, rappelant à tous le prix de la paix, de la démocratie et de la vigilance citoyenne.

Partagez cet article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.